Retour sur cette super dégustation virtuelle à l'aveugle organisé par notre fidèle fléau des profondeurs, et en la bonne compagnie de 4 autres comparses.
On ne connait absolument rien des 5 whiskies au programme, pas même le thème de la soirée.
On commence par
1) Un joli profil assez printannier et délicat, qui me ferait directement partir en Lowlands. Mais où ? Il y a un côté fin et intégré au nez, à mon avis ce n'est pas tout jeune. C'est frais, sur les herbes fraiches, le pain blanc, la poire, le concombre, le poivre blanc. La bouche montre plus d'austérité et de complexité, c'est droit, sec, traçant, on a du plâtre, du fruit vert, de la craie, c'est classe. Je dis Lowlands des années 70 à 49%. J'ai bon pour les deux dernières assertions, pas pour la première. Très chouette.
88
https://www.whiskybase.com/whiskies/whisky/5722/1975-dt
On enchaine sur
2) Beaucoup plus de finesse, on change d'univers. C'est très discret, presque effacé, tout est en filigrane. On a ce fin voile fumé qui est vraiment sublime, un côté coquillage, même un léger fruit exotique derrière. Mais je n'ai pas du tout l'impression qu'on soit sur Islay pour autant, ce n'est pas "ce genre de tourbe-là", il va falloir chercher ailleurs. En bouche, l'entrée est hyper soft, presque trop, pendant au moins 5 secondes on serait incapable de dire qu'il y a de l'alcool là-dedans. En le machant cependant, le profil se révèle lentement, touche par touche, austère et raffiné, sur le fumé, le papier journal mouillé, des notes industrielles style plastique fondu (qui me feront évoquer Glenisla, même si je n'y crois pas vraiment) et finit sur une finale tout en classe et minimalisme qui m'évoque les sushi. Outre Glenisla ça pourrait être un vieux Springbank ou un vieux Glen Garioch, tout en finesse ? En tout cas je dis tourbé hors-Islay, 60's ou 70's, vers 43%. Reveal : comment n'y ai-je pas pensé ? Si la bouche avait été au niveau du nez et un peu plus active, on passait la barre des 90 allègrement : c'est le genre de profil tourbé hyper fin qui me parle à mort.
89
https://www.whiskybase.com/whiskies/whisky/4644/1974-gm
On passe à un tout autre profil
3) Ici, pour la première fois de la dégustation, le fruit occupe la place centrale. On a un léger côté irlandais, framboise, bergamotte, puis rapidement des touches plus végétales sur la camomille, les fleurs de champs, mais on retombe rapidement sur du fruit qui (en tout cas chez moi) reste bien central, avec même des touches de fruit de la passion. Il y a des notes de cake et d'infusion qui, combinées à ce duo fruité-végétal, me font penser (et je suis loin d'être le seul) à Littlemill, très fortement. La bouche ne fait que confirmer ça encore plus, avec ses notes d'agrumes aromatiques (bergamotte) et d'infusion (camomille, jasmin), à ce stade je ne crois plus à la thèse irlandaise. Si ce n'est pas Littlemill, ça y ressemble hyper fort. Je dis Litllemill vers 50%. On mettra tous notre billet là-dessus. Et évidemment, ce n'est pas ça. En tout état de cause, excellent.
90
https://www.whiskybase.com/whiskies/whi ... 3/1977-twa
On progresse, on progresse, et ça ne va pas s'arrêter !
4) On a un nez plus alcooleux que les précédents mais également plus complexe, sur des notes de gaz à l'ouverture qui transitent rapidement vers le fruit, juteux et agrumique, sur la mandarine, le fruit de la passion, des thiols de Sauvignon Blanc qui font le trait d'union vers les notes vernies, acétiques, et légèrement boisées. Un joli coté floral vient s'adjoindre. Ça annonce du beau. La bouche est puissante, vernie, noble, complexe, florale et fruitée, on est sur le bois exotique laqué, la mangue, le citron, l'ananas en boite, la térébenthine. Et une superbe longueur. J'ai du mal à deviner. J'annonce un excellent Glenburgie vers 55% ; après m'avoir annoncé que je n'étais pas dans la bonne région, le maitre du jeu me laisse une seconde chance. Je tente Saint Magdelene, et à la stupéfaction générale, y compris la mienne, C'EST BIEN ÇA !!
Excellent !
91
https://www.whiskybase.com/whiskies/whisky/3894/1982-sv
Et enfin on termine sur
5) Ouch ! On repart (encore) sur quelque chose de complètement différent. Dommage qu'un Ledaig soit déjà passé dans la série parce que sinon je m'en serais fait une bonne hypothèse de travail. Il y a en effet plusieurs marqueurs que j'y ai déjà trouvé comme l'ail, le métal (pièces de monnaie frottées), bref un registre résolument crasseux voire soufré au début avec du purin, de l'alumette craquée, du champignon. Et puis ça se déride, on arrive sur un joli fruit cireux, des notes industrielles plus aimables, toujours une touche purin. On serait quand même pas face à un Brora ? Joli nez en tout cas, mais à ne pas mettre devant toutes les narines. La bouche envoie du steak, c'est très, très puissant, passé l'épreuve de l'alcool on arrive sur un registre très terreux, sec et industriel, sacrément austère, si vous cherchez du fruit, des fleurs, du sucre, de la douceur, passez votre chemin. Finale absolument éternelle sur la terre sèche, le gravier. Je n'ai que très peu d'idées à proposer à ce stade. Certaines notes industrielles (linoléum) me font penser à un Springbank, finalement pour être joueur je propose un Banff sans y croire. C'est puissant en alcool en tout cas, j'annonce au moins 59%. On redescend un peu qualitativement mais quand on aime, ça reste très bien fait.
88
https://www.whiskybase.com/whiskies/whi ... 6-year-old
Eh ben, sacré tasting ! Merci cthulhu pour cette sélection éclectique qui a proposé 5 profils résolument différents, qui par ailleurs sont bien témoin de leur époque relativement lointaine dans leur intégration et leur relative austérité. Un côté anti-putassier qui fait du bien de temps en temps, même si je ne suis pas du tout un passéiste dans l'âme comme vous savez.
A la bonne vôtre !